Sur invitation du Club Loisirs et culture de Chartres

Après une conférence sur Jean Moulin “l’homme derrière le mythe” le public de la médiathèque du village et les représentants de la commune ont souhaité en connaitre plus sur la Résistance dans le département d’Eure et Loir.

Ce sera l’objet de cette projection qui a été suivie d’un échange avec la salle et qui se concluera par une séance de dédicaces des livres de l’auteur-réalisateur.

Conférence le 17 octobre 2023, salle des Fêtes de Senonches. Entrée gratuite et pôt de l’amitié.

Dans cette conférence, nous reviendrons sur ce phénomène, finalement mal connu, de l’utilisation des voyous et autres truands parisiens par la police allemande pour chasser les résistants.

On découvre en fait la soumission totale de la Gendarmerie à la Kreis Kommandantur de DREUX en application de la convention d’armistice signée par Pétain en juin 1940.

Dans cet espace juridique trouble, les truands installent leurs pratiques tout en rendant service aux Allemands : braquages, assassinats, vols et extorsions. L’heure venue de la Libération du territoire verra des policiers français tenter de rechercher ces sbires et découvrir des complicités douteuses au sein même de leur administration.

Cette conférence abordera ce sujet méconnu de l’Occupation à partir d’un exemple sur le territoire de l’Eure et Loir où se mèlent des civils plus ou moins engagés dans la Résistance à Maillebois, des responsables allemands de la Kreis-kommandantur de Dreux, des gendarmes français et un groupe de truands revètus de l’uniforme allemand.

Des soldats allemands qui recherchent et arrêtent leurs propres supplétifs français, des gendarmes français, soumis à la convention d’armistice qui sont contraints de laisser filer les coupables du crime d’un collègue policier parisien, tout se dérègle pendant l’Occupation.

Le parcours d’Yvon Collette, citoyen belge opérant en France pour le compte de la “Gestapo française”de la rue Lauriston à Paris et surtout pour son compte personnel, est un éclairage utile pour comprendre ces relations de pouvoir entre occupants et occupés , relations dans lesquelles le crime organisé s’est inséré avec impunité même si parfois les Allemands imposent des limites sévères à ces dérives sous forme d’arrestations et de tortures diverses

Voici le texte de la conférence :

Yvon COLLETTE

Yvon Joseph Collette est né le 28 octobre 1901 à La Louvière (Belgique)

Marié à Georgette Philippe, 2 enfants

dit « Carlo » son nom de théâtre en Belgique où il aurait été ténor

Déserteur de la NSKK belge (structure de transport allemande recrutant des belges)

Agent allemand lié à la Carlingue (gestapo française Rue Lauriston dirigée par Bonny et Lafont)

Qu’est-ce que la Carlingue ?

Situé dans le chic 16ème arrondissement au 93 rue Lauriston, cette officine groupe des délinquants, des policiers révoqués, des proxénètes et des assassins sous la direction féroce de Henri Chamberlin dit Lafont et de son adjoint, un policier révoqué nommé Pierre Bonny.

Carl Oberg chef de la SS à Paris et Helmut Knochen son adjoint. Procès de 1954.

La Carlingue est au service des dignitaires allemands de Paris comme le SS Helmut Knochen, chef de la sureté allemande que tutoie Lafont. Il tutoie également Pierre Laval chef du gouvernement de Vichy à qui il se charge de fournir tout ce qu’il veut dans la France des restrictions qui doit payer chaque jour 400 millions de francs aux nazis. Cette somme gigantesque est ensuite utilisée pour payer des fournisseurs français qui approvisionnent les Allemands par le truchement du marché noir.

Ce sont surtout les bureaux d’achat allemands, sorte de passage obligé pour faire du commerce, qui sont dans la ligne de mire des truands. Ces services disposent à la fois des commandes issues de l’administration militaire allemande et des fonds permettant de régler les achats.

Il ne leur manque que les intermédiaires français bien informés sur les lieux où se trouvent les marchandises recherchées par l’Occupant. Dans cette faille, la pègre va s’insérer et se rendre indispensable pour satisfaire les officiers allemands toujours à la recherche d’articles propres à satisfaire leurs besoins dans une France rationnée et exsangue.

Un juif franco-roumain nommé Joanovici se taillera un empire commercial en France occupée et sera le principal fournisseur des Allemands. Les hommes de la Carlingue feront appel à lui pour ces marchés tout en prélevant leur part sur ces contrats juteux.

 Lafont

Par ce service rendu, les hommes de la Carlingue acquièrent une notoriété et une reconnaissance à l’opposé de leur statut de truand.

 Pierre Bonny

Ils sont également investis dans la chasse aux maquis, disposant d’un volant de 20 à 30000 hommes pouvant aller jusqu’à 100 000, qui vont agir contre la résistance à Tulle notamment.

Le BCRA à Londres en est informé.

Yvon COLLETTE va évoluer dans ce milieu entre mauvais coups et enrichissement personnel tout en faisant bien attention à ne pas attirer les foudres des Allemands qui, tout en profitant des avantages de ce trafic, font très attention à ne pas apparaitre au premier plan dans les coups tordus.

Il constitue une équipe avec Joseph Halliez, Edmond Vanackère (Didi), et Georges Piat et passe à l’acte :

1er mars 1944 : Collette et Vanackère se prétendant agents de la Gestapo volent chez Madame Sauges 12 rue du petit-Thouars à Paris, 190 000 francs et des bijoux estimés à 2,5 millions de francs.

Quelques temps après, la police criminelle allemande rendra à Mme Sauges un bracelet en or et un collier trouvé sur Collette qui sera détenu ultérieurement.

16 mars 1944 : les mêmes avec Halliez, arrivent chez Mr Hekel-Kuntz 16 rue Cafarelli, cafetier à Paris et lui volent 200 000 francs et des bijoux. Aperçus en sortant par Madame Sauges qui, par coïncidence, était dans le quartier, des coups de feu sont échangés entre les policiers français et les voleurs. Le gardien de la paix Pichot est tué ainsi qu’une passante, Madame Schaeffer, qui était sur place.

C’est Collette qui a tiré et qui s’enfuit. Halliez est arrêté et emprisonné.

Mais, la police allemande exige et obtient sa libération de suite.

17 mars 1944 : Collette et Vanackère se présentent à Maillebois (Eure et Loir) habillés en officiers allemands, pour participer au mariage de Mr Dietrich et Melle Tomassin qui ne les ont pas invités. Les jeunes mariés, réfugiés de Commercy, sont employés chez Desprez transporteur de bois à Maillebois lequel travaille pour la Wehrmacht et qui sera inquiété à la libération.

Les faux allemands couvrent de cadeaux les mariés et remettent au maire Georges Pasdeloup trois fois 500 francs somme qui sera affectée au secours aux prisonniers de guerre.

Collette se fait appeler désormais Kaufmann et quelques jours après, il revient à Maillebois pour exiger la disposition d’une maison réquisitionnée par les Allemands et appartenant au colonel KROOVIER qui a quitté la région par sécurité. 1951                   2023

Le château de Maillebois « sous protection allemande ».

Ce château est convoité par les Allemands pour y installer une Feldkommandantur en 1941. Mais la propriétaire, Madame Hubert Latham veuve du célèbre aviateur ne l’entend pas ainsi et fait agir ses relations auprès des officiers allemands de Paris. Chose unique autant qu’étrange, Karl Heinrich (ou son cousin Otto) von Stulpnagel commandant du Gross Paris lui accorde un protectorat évitant cette présence massive des officiers allemands.

Cela étant, le château servira deux fois de prison, l’une pour parquer les rescapés canadiens du débarquement raté de Dieppe en 1942 et l’autre pour mettre en résidence surveillée Dietrich von Choltiz après la libération de Paris.

C’est à cause de ce statut que la maison envisagée par Collette-Kaufmann et qui est dans l’enceinte du protectorat, ne peut lui être attribuée par le Maire Pasdeloup.

Le château sera tout de même occupé par les SS lors de la débandade de 1944 alors que, dans les greniers, des aviateurs anglo-saxons étaient cachés en attendant les troupes de la Libération.

Le Maire ne peut intervenir sur ce bien sous séquestre allemand et le fait savoir à Kaufmann qui va chercher un ordre libératoire auprès de la Kreiskommandantur de DREUX. Il l’obtient facilement ce qui est un signe de ses appuis allemands.

Ayant eu satisfaction, il s’installe là avec femme et enfants, ne négligeant pas ses allées et venues sur Paris.

 Yvon Collette , photo de 1946

Un bijou de grande valeur qui suscite la convoitise des voyous, et …de Göring

C’est un joyau énorme figurant une branche comportant 7 tiges, 7 feuilles et 7 perles dont le « carafon » de 15 grammes est considéré comme l’un des plus beaux bijoux au monde. Il est la propriété du Vatican qui veut le vendre. Cette mission est confiée au père Robert qui entame des pourparlers de transaction.

Göring, ayant appris l’existence du bijou, aurait exigé de le posséder et des officiers allemands sont allés visiter M.Michelet secrétaire du Père Robert pour le conduire avec le bijou à Göring qui résidait à ce moment dans un grand hôtel de Paris.

Le bijou est emporté dans le bureau du dignitaire allemand et le secrétaire Michelet attend avec angoisse sa restitution. C’est chose faite avec le retour des officiers qui ne proposent que 18 millions de francs au vendeur. De retour auprès du père Robert le négociateur rejette cette offre.

Les Allemands, furieux de voir échapper cette transaction, prennent contact avec la « Carlingue » pour reprendre cette affaire.

6 avril 1944 : Une équipe avec Georges P. (Piat ?), Louis C. (Collette ?), Antoine B., se met en route pour récupérer le bijou au profit des Allemands. Leur intention réelle est de voler pour leur compte cette pièce rare et ils en parlent avec Joseph (Halliez ?) pour passer à l’action.

4 hommes armés investissent donc l’appartement de Mr Musseau au 6 rue Cassette à Paris. Cet agent d’affaires est en train de recevoir le Père Robert, Supérieur des Missions Etrangères, dont le siège est rue du Bac, et qui intervient au nom du Vatican pour négocier la vente du bijou de 605 carats pour le prix de 25 millions de francs.

Le bijou, « la perle d’Asie », (ou perle d’Orient) est dérobée par les gestapistes lors de la transaction chez Musseau avec le père Robert où un de leurs complices (Antoine B.) est aussi présent comme acheteur potentiel pour 25 millions de francs lorsque les « policiers de la Carlingue » revêtus de l’uniforme allemand de la NSKK investissent la pièce, armés en criant : « Gestapo ».

Le bijou disparait donc.

L’enquête de la police française aboutira à l’arrestation d’un complice : Georges Piat âgé de 24 ans qui conduit les enquêteurs sur un nommé Collette, 45 ans citoyen belge condamné 16 fois en Belgique.

Piat, incarcéré, sera libéré par la police allemande.

Yvon Collette (Louis) part alors avec Georgette sa femme se réfugier à Maillebois où ils enterrent le joyau dans une remise. C’est alors qu’à Paris le SIPO-SD allemand, la vraie Gestapo, reprend cette affaire et demande aux autorités françaises l’arrestation de Yvon Collette.

Les Allemands veulent que la gendarmerie française arrête Collette.

22 avril 1944 : Sur ordre du capitaine Guérin commandant la gendarmerie de Dreux, le gendarme Witmann et deux collègues se présentent au Maire de Maillebois pour arrêter Kaufmann-Collette sur réquisition de la PJ de Paris.

Toujours en uniforme allemand, il est au cinéma au café Dubray avec sa femme et se laisse conduire chez Pasdeloup le maire, puis est transféré à Châteauneuf en Thymerais avec la camionnette du maire.

23 avril 1944 : Le chef de la police allemande de Dreux avec 4 soldats, le capitaine Guérin, l’adjudant Witmann et quelques-uns de ses hommes, reviennent pour perquisitionner la maison KROOVIER où habite la famille Collette. Une fouille vaine, hormis des papiers personnels : carte du PPF, engagement dans l’armée allemande, passeport belge, carte grise spéciale véhicule allemand, permis de port d’arme.

L’abondance de ces pièces officielles allemandes fait hésiter le chef de la police allemande de Dreux. Il exige que le prisonnier lui soit remis en le promettant à la sanction suprême, mais il sera libéré peu après.

Collette est donc arrêté par la police française et demandé par les Allemands qui l’emprisonnent. Puis, l’équipe de Bonny et Lafont, mise en demeure par les Allemands de découvrir la vérité, vont s’occuper de Colette et ses complices.

Il est interrogé et brutalisé Rue des Saussaies où il reçoit 300 coups de nerfs de bœuf ce qui le conduit à l’infirmerie dans un état comateux. Sa femme est incarcérée à Fresnes et lui au Cherche Midi. Georgette sera libérée le 30 juin et elle file de suite à Maillebois pour surveiller la planque dans la remise.

Dans sa cellule, avec un résistant emprisonné dont le fils témoignera, Collette cherche à s’évader en sciant un barreau de la cellule…

Il réussira à communiquer sommairement avec sa femme, « réfugiée dans la région d’Evreux », qui est venue à Paris devant la prison où Collette a pu l’apercevoir par la fenêtre. Selon une information non sourcée, il est condamné à la déportation et réussirait à s’évader du train qui le conduit dans les camps de concentration.

Evadé ou libéré on le retrouve à Maillebois en famille quelques jours après où Vanackère (Didi) vient le voir souvent.

A l’occasion de la perquisition du 23 avril, l’adjudant Witmann avait appris l’identité de « Didi » qui a été arrêté à Paris et a été emprisonné peu de temps suite à l’affaire de la rue Cafarelli. Mais Didi est libre à nouveau.

5 juin 1944 : Halliez, qui avait aussi été arrêté après l’affaire de la rue Cafarelli et relâché par les Allemands, intervient, armé, dans un cabaret tenu par Catherine Malle à l’enseigne de « Chez ma cousine », situé à Montmartre.

Il entre dans le restaurant et fait un carnage : il tue Auguste Ricky collaborateur notoire de la Gestapo, avec lequel il est en conflit, puis Jean Pouget, le cuisinier Etienne Demoy, la patronne Carmen Malle et blesse Carmen Marquant la caissière.

Il ne sera pas inquiété avant la Libération.

La libération de la région change la donne

15 aout 1944 : la région de Maillebois est libérée par les Américains et les résistants du maquis de Saulnières dont les deux fils du maire Pasdeloup réintègrent la ferme familiale.

Pendant ce temps, sentant le climat changer, Collette passe chez les résistants parisiens où il se distingue dans les combats de la Libération à Paris. Blessé, il est soigné à Bichat avant de retourner à Maillebois.

20 aout 1944 : Collette réapparait allongé au fond d’une voiture, brassard de FFI au bras. Il est couvert de pansements. Un de ses complices était venu en éclaireur voir si sa planque était toujours accessible et s’il n’y avait pas de résistants dans le village. Il se rend dans la maison de la cachette très peu de temps et repart de suite.

15 jours plus tard, le maire constatera des fouilles effectuées dans le jardin derrière la maison Kroovier occupée un temps par Collette et ses complices. Des pierres plates avaient été disposées sous la terre pour y cacher des objets qui auraient pu être le produit de ses vols dont la « perle d’Asie ».

Le 1er décembre, Collette est déjà à Marseille sur la route de l’exil comme de nombreux collaborateurs ayant des moyens de s’exiler. Cachés dans un petit hôtel ils tentent de négocier la vente de bas de soie féminins mais des oreilles discrètes les écoutent et les policiers débarquent croyant avoir affaire au marché noir.

La justice, enfin.

4 décembre 1944 : Collette et sa femme sont ainsi arrêtés à Marseille dans un hôtel où les policiers retrouvent le bijou volé dans son coffret en or, caché dans le réservoir du WC de leur chambre ainsi que 3 millions de francs. Il y a là la « perle d’Asie », un bracelet en or, 2 bagues en or avec diamants, une montre en platine, un chronomètre, une chevalière, une gourmette le tout en or massif.

 Yvon Colette et Georgette Philippe au procès

Le juge d’instruction nommé réclame les prisonniers et le butin mais Paris réclame aussi le produit du vol. C’est l’inspecteur principal Bouvier qui remonte à Paris avec la « perle d’Asie » cousue sur son gilet ; il est protégé par l’inspecteur Maurin lourdement armé dans ce train bondé de voyageurs. Ils craignent à tout moment une attaque des complices de Collette et décident de descendre à Lyon et changer de train par sécurité.

Le bijou et le reste du butin sont enfin remis au juge par les policiers qui lui répètent la consigne de précaution annoncée par Collette lors de son arrestation : « Prenez le bijou de la main gauche surtout ! ». Il s’agit d’une légende issue du temps où ce bijou était la propriété du shah de Perse.

La « perle d’Asie » sera restituée au Père Robert par la Justice française.

Quant à Collette, incarcéré en attente d’un jugement, il fait valoir des services imaginaires dans la Résistance allant jusqu’à prétendre avoir voulu soustraire le bijou convoité par Göring sur instruction de la Résistance. Des affiches dans Paris sont collées probablement par ses complices pour demander sa libération.

Il est de nouveau libéré pour signes de démence sans être jugé. Arrêté de nouveau et de nouveau évadé il part en Belgique où il est emprisonné pour d’anciennes affaires.

Dans le courant de l’année 1945, il a rencontré un jeune homme de Maillebois à qui il a remis un billet de menaces à l’attention de Pierre Pasdeloup fils ainé du maire et résistant. Il lui annonce les mots suivants :

« Mon cher Pierre, souviens toi de la perle d’orient ; 23 millions tu auras de mes nouvelles »

Ce billet, remis à la police déclenche une nouvelle enquête de la PJ et le policier Joly rencontre le gendarme Witmann pour qu’il lui communique le dossier Collette de 1944 mais ce dossier a disparu.

6 décembre 1945 : le procès contre Collette et ses complices devant la 16ème chambre correctionnelle est reporté pour la 6ème fois, suite aux simulations de folie présentées par l’accusé principal.

15 mai 1946 : la date du procès Collette est enfin fixée. Il a été arrêté et est conduit à l’infirmerie de la prison de Fresnes sous camisole de forces dans une cellule de sureté.

Dans la nuit du 14 au 15, il s’évade laissant sa camisole en lambeau dans la cellule ouverte par l’extérieur. Il vole le vélo d’un surveillant et disparait en Belgique.

Trois gardiens très probablement complices et achetés par Collette sont condamnés à la prison et incarcérés le 18 mai 1946 : Robert Cordier (4 mois), Delphine Guy (8 mois), Jean Battistelli (2 ans), peine assortie d’une indemnité de 5000 francs à verser aux Missions étrangères.

Georges Piat sera condamné à 5 ans de prison et 10 000 francs d’amende le 4 novembre 1948 et sortira immédiatement ayant accompli sa peine avant le jugement.

La femme de Collette a été condamnée à par défaut le 8 juin 1944, à 2 ans de prison,10 000 francs d’amende et 5 ans d’interdiction de séjour.

Yvon Collette fût condamné le même jour et par défaut à 10 ans de réclusion et 10 ans d’interdiction de séjour pour les vols et agressions. La justice belge le condamne également pour détournement de mineure et viols. Il est finalement arrêté à Liège fin novembre 1946 mais il ne reste pas longtemps en prison car il s’évadera rapidement (article du Monde du 15 mai 1946).

1951

Ses complices Halliez et Vanackère sont dans le box du Palais de justice de Paris le 19 février 1951. Reconnu par la caissière du cabaret « Chez ma cousine » qui s’est remise de ses graves blessures par arme à feu, Halliez est condamné à la prison à perpétuité le 21 février.

Vanackère écope de 10 ans et Collette, toujours en fuite, à la peine de mort pour le meurtre du policier Pichot.

Le 20 février 1951 il est arrêté à Lobbes (Belgique) où l’on perd sa trace. L’Echo Républicain annonce dans son édition du 23 février 1951 que Collette a été condamné à mort par contumace.

Cette photographie, signée par Jean Moulin, a été prise par Françoise Thépault sa secrétaire à qui elle est dédicacée, dans la cour de la Préfecture à Chartres le 23 aout 1940.

Le Préfet y apparait fatigué et avec un foulard blanc autour du cou, pour cacher la cicatrice résultant de sa tentative de suicide du 17 juin 1940 où, ne pouvant plus s’opposer physiquement à ses tortionnaires allemands, il tenta le suicide.

Photo communiquée aimablement par Vladimir Trouplin. Musée Jean Moulin .Paris.

En cette 80ème année après la mort de Jean Moulin en juillet 1943 et , dans le cadre des commémorations organisées par l’Association Nationale des Amis de Jean Moulin, fondée par la soeur du préfet et Jacques Chaban-Delmas, cette conférence propose de revenir sur la période “eurélienne” de Jean Moulin entre Février 1939 et le 16 novembre 1940, date de son éviction par Philippe Pétain.

Quel est l’homme derrière le mythe ? Comment aborder sa réalité humaine couverte souvent par l’icone qu’il représente ?

Jean Moulin fût un Préfet du Front populaire, lié à Pierre Cot, de février 39 à juin 40, mais aussi un Préfet devant appliquer les directives allemandes selon la Convention d’Armistice signée par Pétain.

Il décidera de rester à son poste lors de l’invasion allemande de juin 40 à Chartres et de résister, jusqu’à mettre en cause sa vie, aux brutalités physiques et morales que l’Occupant lui réserve.

Cette projection locale s’incrit dans un ensemble d’informations sur le rôle de la Résistance dans ce village de 250 habitants sous l’Occupation.

Une des chevilles ouvrières du soutien au maquis est la personne de Pierre Bréchemier, le curé du village. Il loge dans son presbytère des personnes recherchées dont l’abbé Krier de Luigny pourchassé par la Gestapo. Il y a aussi un jeune garçon de 15 ans, juif en fuite de Paris, dont la famille a été déportée et qui veut se venger.

Il intégrera le maquis de la Ferté Vidame et participera avec le curé au transport des armes parachutées de nuit et cachées dans le clocher de l’église.

D’autres figures locales sont citées comme le boucher Maurice Jahandier (Beefsteak au maquis) qui assure la pitance aux maquisards.

Plusieurs précisions seront données après cette projection qui a fait découvrir aux habitants actuels les activités glorieuses d’une poignée de leurs prédécesseurs.

Dans le cadre de l’année Jean Moulin et pour le 80 ème anniversaire de sa disparition entre les griffes de Klaus Barbie, une campagne en Eure et Loir, intitulée “Jean Moulin vivant” a été organisée par le département, la ville de Chartres et la Préfecture.

Le CEDREL s’est associé à ces manifestations diverses : conférences, théatre, commémorations, qui feront vivre la mémoire du Préfet d’Eure et Loir en 1940 au moment où les Allemands envahissent Chartres, puis tout le département;

Une conférence spécifique à cette année 1940 en Eure et Loir se déroulera à la Médiathèque de Fontenay sur Eure le 7 octobre prochain à 14h 30.

Albert HUDE, président du CEDREL et correspondant départemental de l’association nationale des Amis de Jean Moulin fondée par Jacques Chaban-Delmas et Laure ,la soeur du Préfet Moulin, développera les séquences particulières des journées de juin 40 au cours desquelles il fût quasiment torturé et, qu’en désespoir de cause, il tenta de se suicider pour ne point faillir à l’honneur. Inscriptions et renseignements à la Médiathèque de Fontenay sur Eure.

Photo prise à Chartres en début juillet 1940 par Françoise Thépault secrétaire de Jean Moulin , dédicacée et signée par ce texte: “A ma secrétaire Françoise Thépault, meilleurs souvenirs, Jean Moulin, 25-8-1940”. Document communiqué par le Musée Jean Moulin à Paris et Vladimir Trouplin.

A noter que Jean Moulin porte au cou une écharpe blanche, qui sera un signe distinctif du personnage, laquelle cache une profonde cicatrice de sa tentative de suicide dans la nuit du 17 au 18 juin 1940 à l’Hotel-Dieu de Chartres.

Le maquis de Crucey est encerclé par un bataillon.


Qui étaient ces maquisards retranchés au Bois de la Rue ?


Jules Vauchey est de ceux-là. Il est né en 1896 et tient un café à Malakoff en banlieue parisienne tout en étant douanier comme brigadier d’octroi. En 1939, il s’installe à Crucey et y rencontrera Yvonne Leroic qui tient le Cri Cri d’Or café du village, et qui deviendra sa compagne de résistance.

Jules Vauchey, un peu oublié aujourd’hui décèdera à Louvilliers en 1960 et est enterré à la Framboisière.
Vauchey va construire un noyau de gens sûrs pour agir contre les allemands. Cela prendra plusieurs années et au début de 1944, il peut compter sur des gens déterminés. Un maquis sera constitué au bois de Paradis, après le bois de la Rue par des jeunes gens encadrés par quelques anciens comme Vauchey ou Raymond Dive.


On y retrouvera aussi Fernand Thierrée, maire de Crucey, Montet l’artificier, l’électricien Albert Marie et son fils, Raymond Renard de l’équipement, Georges Elie et bien d’autres.
Les jeunes affluent. Ils se nomment Jean Rousseau, son frère Robert et son cousin Jacques, Louis Boilly, Gilbert Caillé, Pierre Gaudin, Marcel Thibault, Albert Chauvin, Maurice Pescheux, Georges Lenfant, Robert Monnet, Christian Vieljeux, Roger Angoulvant, le séminariste Joseph Hul, le Grand Charles. A cette troupe s’ajouteront après leur évasion 4 sénégalais, le marocain Abdelkader et l’algérien Zabel tous anciens soldats français prisonniers depuis 1940 dans la région.

Une foule de réfractaires STO arrive donc aux maquis. Il faut tester leur capacité de discrétion et d’engagement et on les place en ferme pour les tester.
3 sur 10 seulement seront pris au maquis. Mais ceux là seront les meilleurs.

Comment sont organisés les maquis ?


Donnons la parole à Raymond Dive, chef de groupe du maquis de Crucey sous la direction de Jules Vaucher où ils sont une quinzaine dans le bois à chercher à s’abriter pour y dormir :

.”On pense d’abord à la litière ; puis, quand le matelas de feuilles ou de fougères parait suffisant pour faire oublier au corps les bosses des cailloux ou des racines, on pense à se préserver contre le vent, contre la pluie probable et aussi contre les regards des visiteurs imprévus.
Plus tard le logement prendra l’allure d’un véritable camp retranché au bois de la Rue avec cabanes en bois recouvertes de végétations, tente marabout pour les réunions, réfectoire en plein air, poste de commandement et même prison”

Dessin du maquis au Bois de la Rue d”après Raymond Dive

Il faut nourrir la troupe de jeunes gens affamés et c’est le rôle indispensable des habitants qui soutiennent les maquis. Sans eux, et ils seront nombreux, les résistants n’auraient pas pu tenir dans la clandestinité.
Ils méritent d’être cités et notamment : le couple de charbonniers Tessier à la Rue, la ferme Lefol à la Couvertière, Mme Dejonc au château de Paradis

Charbonniers au bois


Quant au tabac, très recherché et très rare à l’époque, ce sont des commandos de résistants qui dévaliseront les dépôts officiels comme seront dévalisées les mairies pour récupérer des tickets d’alimentation.


Nourris et logés, il faut maintenant former au combat tous ces jeunes qui n’ont jamais fait de service militaire. Leur apprendre le maniement d’armes, le tir, et surtout la discipline et la discrétion.
Les liens avec la famille et les amis doivent être revus car toute indiscrétion met en péril tout le maquis que la Gestapo et la Milice cherchent à détruire.


On ne quitte pas le maquis sans une permission du chef. Si quelqu’un ne respecte pas les consignes de sécurité, une sorte de tribunal se réunit et condamne le résistant. Et d’ailleurs c’est ce qui se produit au maquis puisque dès la première nuit au bois de la Rue le 6 juin, 2 hommes disparaissent et il faut les retrouver d’urgence car tout le groupe est en péril.
Aussi, Vauchey décide de se porter vers le Bois de Paradis d’urgence.

Comment trouver des armes ?


Au début, ce sont deux ou trois pétoires de 14-18 et quelques fusils de chasse ayant échappé à l’obligation de dépôt à la mairie, qui sont les seules armes du maquis de Crucey.
C’est très insuffisant pour agir militairement et les résistants se bornent à saboter les lignes électriques et téléphoniques dont les poteaux sont sciés au passe-partout ou bien ils suppriment les poteaux indicateurs pour désorienter l’occupant sur les routes.
Les armes sont en Angleterre, pays qui ne sait presque rien de la résistance naissante car il n’y a pas de moyen de communication. En France occupée, les postes de radio ont été déposés en Mairie comme les armes de chasse sur instruction de la Kommandantur.

STEN MK 2

Voici un cas précis de parachutage :


Le 20 juillet 1944 à La Pommeraie la nuit est noire et le brouillard s’est levé. Au sol il y a le capitaine Pierre JEROME (Gérard Dedieu), Jules Divers (Les Chaises) ainsi que Bonnin et Confais, Raymond Dive et Fernand Montet (Crucey), ANATOLE (Joseph Le Noc) de La Ferté Vidame et SINCLAIR (Maurice Clavel) le Chef départemental de la Résistance. Les groupes de Dreux, Saulnières et Maillebois sont également présents.
SINCLAIR utilise le « S Phone » appareil de communication directe avec le pilote reçu lors d’un précédent parachutage. L’avion est encore au-dessus de Verneuil sur Avre quand la communication s’établit.
Au sol une balise démontable (EUREKA) est branchée sur une antenne mobile qui émet un signal puissant grâce à une batterie et l’avion perçoit le signal quasiment depuis son décollage en Angleterre. Il n’a plus qu’à suivre sur son cadran (REBECCA) pour arriver au lieu de réception. Photo antenne

Cet appareil est si précieux qu’il a été piégé au montage pour éviter qu’il tombe intact aux mains de l’ennemi. Avec une précision de l’ordre de 50 mètres la réception est facilitée.


Les armes sont là. Il y a des mitraillettes STEN, des fusils mitrailleurs GLEN, des mines anti chars, des grenades, et des crottins avec toute la panoplie des crayons allumeurs. Cependant, les notices sont en anglais que personne ne parle sauf Popeye. D’où la nécessité d’une formation poussée des recrues sans expérience.
La nuit, on entendra parfois des tirs dans les bois autour de La Framboisière ; ce sont les maquisards qui s’entraînent avec leurs instructeurs.


La Résistance va passer à l’action militaire.


Le choix de la stratégie adoptée résulte de cet immense déséquilibre des forces en présence. Pour la résistance, c’est l’attaque surprise qui est choisie.
Il n’y aura aucune bataille frontale, ce qui aurait été un suicide. Les « terroristes » comme les nomment les allemands, repèrent des objectifs, arrivent en silence la nuit, frappent et s’évanouissent dans la nature. Ils connaissent chaque chemin, chaque bosquet, chaque ferme amie et l’ennemi ne peut les poursuivre.
Mais si l’un d’entre eux est pris, souvent sur dénonciation de français, c’est l’exécution immédiate. A Crucey, il y aura quelques blessés au combat mais pas d’exécution tandis qu’à la Ferté Vidame 3 maquisards de 20 ans seront torturés puis fusillés au Château du Gland en aout 44.

Les attaques avec des crottins et celles avec des mines de 3,5 kg deviendront fréquentes sur les routes empruntées par les convois allemands. Elles se déroulent loin des habitations pour éviter les prises d’otages et ne donneront lieu à aucune arrestation de résistants.
La stratégie s’avère payante pour la résistance.


Cependant, les maquisards ne sont pas à l’abri des dénonciations ou des informations obtenues par la gestapo auprès des résistants arrêtés.

Encerclement du maquis par le bataillon allemand


La destruction du maquis de Crucey.


Tant que ce groupe de résistants est fixé à Paradis ou à la Rue, il se spécialise dans les attaques de convois avec les explosifs placés la nuit sur les routes. Une fois leur effet assuré sur les convois, ce sont les mitraillettes, les grenades et le fusil mitrailleur qui entrent en action.
Mais si cela est demandé par le commandement départemental, le maquis fait des prisonniers parmi les soldats. Ainsi, le 9 juillet, Silvia Montfort vient à la Rue pour passer cette consigne. Dive et Farjon partent avec le grand Charles sur la route de la Framboisière où deux soldats ont été repérés. Une courte bataille a lieu et les soldats sont désarmés. L’un d’eux résiste et doit être abattu par Dive. Il sera enterré dans le bois de Paradis après avoir été délesté de ses armes et ses papiers. L’autre est ramené au maquis où il effectuera les corvées pour les maquisards, ne regrettant pas du tout sa vie de soldat.

Il sera libéré par l’attaque allemande du maquis qui se déroule le 25 juillet 1944.

Ce jour là, à l’aube, 600 à 800 soldats encerclent le bois de la Rue, les chemins et les hameaux alentour. La veille et l’avant-veille des camions de miliciens sont apparus dans le hameau et ont fait feu en direction du bois en tirant à l’aveugle.
C’est donc l’alerte au maquis. Ils sont 15 terrés dans le bois avec leurs armes et se positionnent en hérisson à la corne Nord Ouest du massif. Le combat est trop inégal et c’est un massacre qui s’annonce. Pendant que Raymond Dive, qui était à l’extérieur au moment de l’encerclement, tente de contourner le bois revêtu de son uniforme de cantonnier, les maquisards décident d’enterrer leur armement et de tenter une sortie par petits groupes entre les patrouilles qui ne peuvent tout boucler compte tenu de l’étendue de la zone.

Avec des outils de bucherons, ils sortent progressivement et se réfugient vers Angennes. Les Allemands ne trouveront rien dans le bois où ils tirent à l’aveugle dans les fourrés où ils progressent. Un maquisard sera touché légèrement par une de ces balles perdues mais tous sont sains et saufs. Dès ce moment, le maquis de Crucey déménage ailleurs où il continuera les attentats sur les routes. Plus tard, les cabanes seront réoccupées quelques nuits en fonction des besoins des maquisards.


Comment les Allemands sont-ils arrivés à connaître le lieu du maquis ?


Depuis le débarquement du 6 juin 44, la résistance est présente à Paradis et à la Rue. Il y a des allées et venues d’hommes jeunes, inconnus des habitants des hameaux, ce qui interroge certains. Dans le café d’Angoulvant à la Rue, certains maquisards s’attardent en bavardages inconsidérés. L’un d’eux y exhibe sa STEN pour impressionner les clients et le chef du maquis doit sanctionner ; il sera muté dans un autre maquis.

Le secret, gardien de la sécurité de chacun, est mal gardé et des informations peuvent remonter à la Gestapo de Brezolles.
Ensuite, intervient le 18 juillet, le plasticage du viaduc de Cherizy, c’est-à-dire de la voie ferrée principale pour le ravitaillement allemand de Normandie. L’attentat est à l’actif de la résistance départementale dont les éléments de Crucey comme Montet, Dive ou Popeye qui ont convoyés et posés les explosifs.
La Gestapo liquide ses dossiers et rassemble toutes les informations pour détruire les groupes de résistance du nord de l’Eure et loir.
Successivement les groupes de Dreux, Crucey et la Ferté Vidame vont être attaqués par la Wehrmacht :

Quant à Pierre July, il s’évadera dans des conditions obscures du wagon qui le conduit en Allemagne.
A Crucey les Allemands ont été conduits par July qui a sans doute parlé. Jules Vauchey est caché dans une niche à chiens derrière des touffes de dahlias et devant le café tandis que les soldats fouillent la maison. Sa compagne Yvonne sera déportée de camp en camp jusqu’en avril 45, date à laquelle elle rentrera à Crucey avec 37 kg de moins et une santé détruite.

Vauchey s’enfuira vers Morvilliers, puis plus loin quand les soldats détruiront la ferme où il s’est réfugié.

On reconstitue le maquis et on poursuit les attaques plus loin.


Les maquisards de Crucey reconstituent leur groupe dès le 26 juillet où ils se réfugient dans une grange à Angennes. Les armes cachées aux Mittereaux sont transférées dans les marnières de Revercourt et de nouveaux soutiens sont sollicités pour la nourriture comme Léopold Debue, Henry Cherrey ou Madame Marie.


Le 30 juillet 44 à 22 heures presque tout le monde est réuni à La Valéterie au bord de la Meuvette lorsque l’ordre d’attaquer sans relâche lui parvient. 2 équipes partent au combat : l’une aux Louvis sur la RN 839 et l’autre vers Sevard.
A Sevard, Dive place un FM servi par Gilbert Caillé et Marcel Thibault à 80 m de la route. Pierre Gaudin, Albert Chauvin, Louis Boilly, Boby Vieljeux et Raymond Dive assureront les tirs à la mitraillette. Des crottins et du plastic sont posés sur la route et on attend.
Deux camions arrivent de Brezolles et l’un accroche un explosif. C’est le signal des tirs pous les 5 maquisards équipés de STEN. Le FM est enrayé et ne peut assurer la destruction complète du convoi ; c’est donc le repli d’urgence vers La Valéterie. A noter que ce camp du maquis est installé à 100 mètres d’une batterie anti aérienne de la FLAK allemande, ce qui n’empêche pas les résistants de s’endormir tranquillement.


Le 9 aout, nouvel ordre d’attaque générale pour le maquis. 2 groupes sont constitués dont celui de Dive qui doit étrenner un bazooka reçu en parachutage. Le maquis a encore déménagé et se trouve maintenant vers Prudemanche. Il s’agit d’attaquer sur la RN 12 voie principale de ravitaillement allemand pour le front de Normandie. Les convois de chars et de véhicules blindés défilent sans arrêt vers le front.


Le 10 aout à 2 heures du matin, le groupe part en direction de l’Avre et de Dampierre. Après la traversée d’un marécage, les maquisards lourdement chargés se placent aux Carrières :
Georges Elie et Albert Marie sont près de la nationale dans un bosquet, Boby Vieljeux, Dive et Louis Boilly se placent en arrière avec le bazooka tandis que Pierre Gaudin et Vanelsue assurent la protection de retrait dans le bois avec le FM.


La cible est choisie avec précaution car il ne faut pas que les troupes ennemies soient trop nombreuses. A 4 heures un gros camion suivi d’autres arrive et le bazooka entre en action. Le coup est dévastateur en plein milieu du transport de troupes.


C’est l’ordre de repli pour les maquisards car les redoutables motos avec side-car surmonté d’une mitrailleuse dévalent le terrain pentu vers les assaillants en tirant avec des balles traçantes. Le brouillard s’est levé et les silhouettes des fuyards deviennent des cibles pour les allemands. Les dernières clôtures franchies, le moulin de la Bouverie est dépassé et les résistants se cachent un instant dans la côte du Plessis d’où ils voient passer sous leur nez les poursuivants. Tout le monde est sauf et regagne le repos vers Sotteville .
D’autres attaques nocturnes seront lancées par le groupe désormais très aguerri qui va loger quelque temps chez Joseph l’italien à Sotteville.

Les maquisards continueront le combat ensuite pour la libération de Dreux puis de Paris et enfin des poches de l’Atlantique.


Anecdotes :
Mairie de la Saucelle le 25 juin 1944 : Lors de l’attaque à la Saucelle un gendarme est pris à partie par la bande de malfaiteurs cachés dans le bois de Paradis selon des témoins peu dignes de foi. Les maquisards de Crucey sont assimilés un peu vite aux profiteurs de guerre. Pour en avoir le cœur net, le gendarme Echard de Senonches contacte l’abbé Corre qui correspond avec le maquis. Fernand Montet est prévenu et rencontre le gendarme avec l’abbé Corre pour restituer la vérité et disculper les maquisards de Crucey.


Roger Angoulevant de La Saucelle est chargé à 17 ans de surveiller le dépôt d’armes que le groupe de Dreux n’a pu emporter 2 jours avant au parachutage de la Pommeraie. Les soldats qui encerclent le maquis menacent de l’exécuter quand le Maire de la Saucelle obtient sa grâce auprès de l’officier allemand.


Gabriel Herbelin, chef du grand maquis de Plainville est né à la Saucelle au début du siècle dernier. Sa famille déménagera souvent et lui-même deviendra représentant chez le grainetier Truffaut, ce qui lui permettra beaucoup de contacts avec les cultivateurs. Il a probablement connu des jeunes de son age à la Ferté Vidame et chassé avec des Anciens comme Mary Thibault de Morvilliers.

Herbelin sera le parrain du maquis de la Ferté Vidame et transmettra 2 mitraillettes STEN à Joseph Le Noc le 3 février 1944, date de création de ce maquis.

Quelques mots sur Jacques Raymond DIVE :

Il est né dans la Marne à Warmeriville le 1er octobre 1910
Service militaire dans la Marine du 1/10/31 au 1/10/32 comme matelot 2ème classe
Père de trois enfants, il n’est pas mobilisé en 1939 ce qu’il refuse par une demande d’engagement volontaire pour une unité combattante refusée également.

En 40, agent cantonnier à Brezolles il est soumis à des menaces de sanctions du fait de son attitude patriotique.
En 41, il fait une campagne de démoralisation contre l’occupant et noue des contacts pour envisager une résistance armée.
En novembre 43 il prend contact avec Jules Vaucher à Crucey pour organiser un groupe de résistance armé.
1er juin 44 il est nommé chef de groupe et le 7 juin, il prend le maquis avec son équipe au bois de Paradis.

Ce petit maquis, moins de trente maquisards, aura un bilan impressionnant après ses attaques nocturnes contre les convois allemands.

Et, comme d’autres, il sera présent et actif pour la libération de Dreux le 17 aout 1944, puis, avec les troupes de Leclerc on le retrouve à Paris lors des accrochages et de la bataille au Palais du Luxembourg.

Un article beaucoup plus détaillé sera bientôt publié sur le site, mais, en attendant, une rencontre se déroulera sur les lieux d’activités de ces résistants le samedi 6 mai 2023.

On y découvrira qu’en fait, ce maquis n’était ni à Crucey, ni à Brezolles mais dans les bois de Paradis (Louvilliers les Perche) puis de la Rue (La Saucelle).

L’avion HALIFAX

C’est dans un champ approprié pour ce type d’opération que l’équipe d’André GAGNON et son fils Jean déroulent la première réception de matériels et d’hommes.

Le 23 mars 1943 sur le territoire de Meslay le Grenet, des hommes attendent dans un champ. Il y a là aux cotés de d’André GAGNON l’organisateur, Charles PORTE le commissaire de police, le maire Alcide MANCEAU , Paul ROUGEAUX, Max LEBOIS et quelques autres dont Jean AYRAL (Pal) responsable du BOA et mandaté par Londres.

Un Halifax débouche dans la nuit et lâche plusieurs parachutes : sept containers et colis atterrissent, un huitième se perd au-delà du terrain choisi. Deux hommes également : un opérateur radio, Louis TOLME (RodW) avec son matériel et un instructeur en sabotage, Jean François LE GAC(Pal A) qui vont rejoindre Paris. Il y a 7 containers et plusieurs colis de matériels Radio. Un colis sera introuvable et, le lendemain, un habitant ira le remettre à la Gendarmerie.

Compte tenu de la quantité reçue, une partie seulement est emportée par les deux agents et le reste est stocké chez André GAGNON à Chartres.

Début avril, François BRIANT (PalW) revient chercher le matériel chez GAGNON avec un jeune homme nommé Gilbert, le fils d’un magistrat, ami de Gilbert VEDY (Médéric) qui se révélera peu sérieux dans ses missions. Mais, à cette époque en Zone Nord, Jean AYRAL (Pal), nommé par Jean MOULIN, ne dispose que de 2 radios expérimentés (Pal W et Rod W) et, de plus, les cristaux de PalW, nécessaires à l’émission sont inadéqutes pour la zone Nord.

Le matériel reçu à Meslay le Grenet est donc de première importance pour le réseau des agents de Jean MOULIN à Paris.

Le premier parachutage en Eure et Loir a donc été un succès, il y en aura presque 40 d’ici à la libération. Ce terrain est baptisé Bison et son code était « du soldat de plomb à la flèche, le soir nous chasserons le bison ».

Ce qui semble simple à décrire a nécessité tout un travail complexe de préparation dans des conditions extrêmement délicates. Ce succès est à mettre à l’actif du Bureau des Opérations Aériennes (BOA) dont André GAGNON est le responsable pour l’Eure et Loir et d’autres départements.

Le BOA n’est pas la seule organisation qui prépare les parachutages. Le Special Operations Execution (SOE), l’ORA ou France Maquis interviendront parfois sur les mêmes terrains de réception. Des problèmes de concurrence peuvent apparaître au milieu de l’action clandestine.

Ce n’est pas facile à organiser, d’ailleurs ce premier parachutage devait avoir lieu le 19 février 1943 jour où les équipes au sol attendront vainement l’avion Halifax qui ne viendra pas, malgré 4 heures d’attente sous la lune.

Paradoxalement, ce parachutage va conditionner la mise en clandestinité totale d’André GAGNON et de son fils Maurice.

Alors que l’opération est réussie et que ce test doit permettre l’amplification des livraisons d’armes, de matériels radio et de renseignement en Eure et Loir, une trahison va précipiter les choses.

Le jeune Gilbert, qui participait à l’enlèvement du matériel livré chez GAGNON, est retrouvé fortuitement à Paris par les agents de Londres et témoigne de son arrestation avec Louis TOLME, Louis PETITE (PalZ) et François BRIANT (Pal W) mais il a été le seul libéré du groupe arrété.

Une enquête discrète est menée et conclue à sa trahison “pour sauver sa peau” face aux menaces de la Gestapo parisienne. Gilbert sera exécuté dans le bois de Meudon par Médéric le 20 avril 1943.

Une série de perquisitions est menée dans les planques et les contacts du groupe à Paris ce qui nécessite une réorganisation d’ampleur pour éviter l’hémorragie. De leur coté, GAGNON, père et fils et PORTE prennent la clandestinité et établisse un nouveau plan de contact afin de rendre opérationnels les futurs terrains de parachutages euréliens.

Le second parachutage se délourera sur le terrain ANE près de Clévilliers où le groupe de Jules DIVERS du “secteur Nord” sera associé pour la réception des colis dans la nuit du 16 au 17 mai 1943.

Voir “de la Résistance en Eure et Loir aux souvenirs personnels. André Gagnon. 1982”

Voir “Paul Schmidt dit Kim. Dominique Schmidt. 2022”

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