Madame Massion Yvette née Harranger est née le 16 mars 1923 à Illiers.
Après ses courtes études, elle devient agent du Trésor Public à Chartres.
C’est l’Occupation allemande dans la ville où elle rencontre Marcel Massion (Pierre) qui deviendra son mari. Ils vivent un moment ensemble à Chartres mais des activités clandestines attendent Marcel au sein des groupes de résistants des cheminots de la ville.
Il est recherché pour avoir déserté le STO et doit prendre la clandestinité.
Yvette suit son mari et quitte subitement appartement, métier et famille pour le suivre d’abord à Brou chez ses beaux parents puis à Trizay les Bonneval.
On est en avril-mai 1944. Le rendez vous avec Marcille est situé entre G>ohory et Yevres et chacun se méfie de l’autre avant de s’entendre sur la mission.
Un moulin en ruines à Prémoteux va accueillir le couple pour leur nouvelle vie dans la clandestinité. Le lieu a été découvert par le fils du forgeron André Marcille âgé de 19 ans qui en avait reçu l’ordre de Maurice Roquet (commandant Jacques).
Yvette est chargée de surveiller les stocks d’armes qui vont arriver des parachutages et d’accueillir les jeunes réfractaires au STO qui seront ensuite placés dans des fermes en sécurité. Quant à Marcel, il lui est confié avec Marcille la mission d’assurer la formation au tir de ces recrues le soir dans les bois.
Le Moulin de Prémoteux devient un sous PC du secteur FTP de Beauce-Sud. Il est en très mauvais état et minuscule: deux pièces seulement dont une chambre et une cuisine où tout est entassé. Mais il est à l’écart des routes et on voit venir de loin les visiteurs.
André Marcille (François, Badaboum) place les jeunes en ferme et s’occupe du ravitaillement.
Tous les frais sont supportés par le livret d’épargne du couple Massion qui ne seront jamais indemnisés, les FTP ne bénéficiant pas des fonds de Londres.
“Fifine”, une polonaise qui parle français assure la liaison avec le PC de Gohory et apporte les ordres de Jacques. Elle est chargée aussi de nettoyer les armes et de vider les containers avec Marcel.
Une alerte sérieuse fera fuir à travers champ Yvette alors enceinte: un motocycliste allemand s’arrête un jour sur le pont de l’Ozanne devant le moulin pour demander sa route alors que Fifine est derrière la haie en train de vider des containers d’armes.
Avec sang froid, Marcel le renseigne sans se départir de son calme, l’allemand repart et Marcel ira récupérer sa femme au fonds du champs où elle est partie.
Parfois le moulin est gardé par une équipe de protection composée de tirailleurs sénégalais et maghrébins délivrés des Allemands par la résistance. Yvette est terrorisée par cette présence ,n’ayant jamais vu auparavant ces étranges individus en uniforme défraîchi de l’armée française. Mais ce sont des hommes corrects et dévoués à la résistance et la peur s’efface.
En août 44 , 5 jeunes gens passent par le moulin avant de partir en mission vers les libérateurs américains qui sont arrivés dans les départements voisins à l’Ouest. Ils ont une vingtaine d’années et sont plein d’entrain. Yvette se réjouit de cette présence éphémère et les gâte en leur offrant un pâté maison qu’ils engloutissent avant de partir.
Ce sont les 5 hommes qui vont être massacrés les jours suivants par une compagnie SS remontant du Sud de la France et stationnée à Cormainville.
Yvette ne se remettra jamais de cette disparition et des conditions du massacre et des les tortures subies.
On lui confie la fonction de secrétaire du Commandant Jacques et elle tape les rapports et courriers sur une machine à écrire que Rafael (ou le grand Marcel) lui apporte.
Dans son témoignage au CEDREL, elle écrit :
“La Résistance” a été pour moi, une école, une institution fraternelle basée sur la confiance et la solidarité, le courage et l’abnégation réciproque de chacun et de tous, sans lesquelles aucune action n’aurait été possible. Et ce fût sa force et son pouvoir.
Elle est décédée à Chartres le 27 mars 2022.